Pourquoi
pas ? |
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Théorie
Sociale
Je ne crois pas qu'il puisse exister de société sans
principe. Ce principe c'est ce qu'autrefois (et parfois encore
aujourd'hui) l'on nommait Dieu. Et avant cela encore Brahman, ou Grand
Esprit, Manitou, etc...
Le principe peut être personnalisé ou non, l'important est
qu'il soit représenté, nommé. Car l'esprit a
besoin de symboles, de masques pour exister concrètement. Ma
recherche au cours de ces dernières années, a
consisté à chercher sous quelle forme concrète
pouvait être dans nos sociétés actuelles
représenté l'esprit, le principe inspirateur de la
société.
Par esprit nous entendons en effet la puissance dynamique, le souffle
dans son sens étymologique précis. C'est le souffle invisible qui
anime l'être.
Avant de continuer, je voudrais d'abord remercier ici monsieur Hegel dont l'esprit justement, bien qu'il soit mort, inspire encore bien des chercheurs.
* * *
Le principe cause de l'être, nous le nommons Vie. Je propose donc
de bâtir nos sociétés en les fondant sur le
principe de l'Alliance avec la Vie (AV).
Ceux qui me connaissent savent que j'ai songé à bien
d'autres principes comme la liberté, l'humanité, l'un, la
communauté, etc... Pourquoi ce principe, la Vie, plutôt
qu'un autre ?
Il faut remarquer d'abord que ce n'est pas un principe social,
politique ou identitaire. C'est un principe libre, c'est à dire
précisément non appropriable par telle ou telle
communauté humaine. Comme l'écrivait fort justement Proudhon en effet, la propriété c'est le vol.
Les sociétés sous la forme des nations, sont
entrés en rivalité les unes avec les autres, au nom de
principes qui ne sont en fait que des drapeaux guerriers. Les dieux en
font partie, on le constate encore malheureusement tous les jours au
moyen orient. Il s'agit de dénoncer cet état de fait,
comme non naturel mais structurel, c'est à dire culturel et donc
amendable, perfectible.
Notre alliance ne s'inscrit donc pas dans le cadre national. Elle est
universelle et libre, non étatique. Je rappelle que Marx
concevait le communisme comme abolition de l'État. Sans cette
abolition, au moins dans les consciences, il n'y a pas de
révolution.
Je dis dans les consciences, parce que l'État en tant
qu'institution pratique, de gestion, à un rôle à
jouer. Mais il ne saurait plus être identifié au lieu
d'incarnation de l'esprit, comme le concevait Hegel (paix à son âme).
Pourquoi ? Parce-que l'esprit doit demeurer libre, qu'il est non
appropriable. Aucune institution humaine ne saurait l'incarner.
Cependant il demeure en nous.
Cette Alliance pour la Vie
(AV), est donc une alliance libre, non incarnée, non
privatisée par tel ou tel parti, communauté, nation. Elle
est à la fois à tous et à personne. C'est une
formule transcendante qui représente à mes yeux la vraie
forme de l'absolu en tant qu'esprit et principe.
* * *
L'erreur de Hegel à mes
yeux, c'est d'avoir identifié le principe avec la puissance. En
tant que souffle animant, l'esprit est en effet puissance, mais il est
au-delà : il est la cause absolue.
Le nationalisme, c'est une sorte d'idolâtrie : on croit que
l'État incarne le principe. Il faut absolument interdire ce type
de croyance. Je dis interdire, car ce n'est pas sans autorité
qu'il faut agir dans le monde.
Au nom de notre principe, de l'Alliance pour la Vie
(AV), nous pouvons parler et agir avec autorité. Mais ce ne sera
jamais au nom d'un État, d'un groupe d'intérêt
particulier (et l'État je le rappelle pour ceux qui en
douteraient est un groupe d'intérêt particulier). Ce sera
au nom de l'absolu, non du particulier, de l'universel commun à
tous, non du propre à quelques-uns.
L'erreur de Marx (c'est l'heure
des règlements de compte), c'est d'avoir fait reposer le
processus d'évolution historique sur les bras d'une classe
sociale particulière, d'ailleurs définie arbitrairement
comme il se doit à partir de présupposés
économiques : le prolétariat.
Pour nous, l'esprit, le principe inspirateur de l'être et de son
devenir ne saurait être approprié par quiconque. C'est
toujours un vol quand c'est le cas (gloire à saint Proudhon).
Les hommes vivent dans le cadre d'activités économiques
définies, mais ce ne sont pas ces activités qui
déterminent l'être social de façon fondamentale :
le principe est transcendant. Marx
a voulu remettre sur ses pieds la philosophie et surtout l'action
politique, en passant de l'idéalisme au matérialisme.
C'est encore une erreur. En fait il faut concevoir la matière
comme un matériau brut ou neutre que l'esprit informe. La
matière n'est que résistance, poids mort, inertie.
L'esprit est mouvement et devenir ; désir et vie.
Le seul aspect positif du marxisme, son caractère utile, c'est
d'avoir su donner une dignité aux travailleurs et au travail.
L'esprit en effet matériellement, c'est du travail. La force qui
transforme et informe la matière, lui donne vie. L'esprit ne
devient présent que par et dans le travail. Il ne s'agit pas
d'adorer un idéal purement métaphysique, sans lien avec
la vie concrète. L'Alliance avec la Vie (AV) n'est pas une alliance mystique, c'est une alliance concrète.
* * *
Justement, puisque nous parlons de choses concrètes, je voudrais maintenant évoquer la sexualité et Freud
qui en est le penseur le plus décidé. Le sexe est
l'expression biologique concrète du principe de vie. Le principe
n'est pas identifiable au sexuel ; encore une fois, il est
transcendant. Le sexuel est simplement son mode d'expression biologique.
Freud se posait la question du
rapport esprit/pulsion. Comment passe-t-on de l'un à l'autre ?
Comment du corps peut-il y avoir avènement au niveau de la
conscience ? Eh bien cela passe par la représentation et
notamment le fantasme. Le fantasme n'est pas la reproduction d'une
réalité historique donnée, même si les
éléments qui le composent reprennent des matériaux
venus du vécu. C'est la transposition
dans la dimension imaginaire de la pulsion biologique. La scène
du fantasme ne fait pas référence à une
scène réelle vécue, mais à une
réalité intérieure primitive. C'est un cadre qui
donne à la pulsion un lieu d'expression, un lieu d'existence
dans la représentation. Ce par quoi elle est en quelque sorte
intégrée et légitimée par la structure
psychique individuelle, le moi conscient. Mais cette
domestication/intégration de la pulsion au cadre de la
représentation subjective implique toujours la présence
d'un manque, d'une perte fondamentale.
C'est finalement cette perte qui est mise en jeu dans le fantasme, une
scène primitive dont le sujet a été le
témoin et à laquelle son regard demeure accroché,
entre fascination et horreur.
Au-delà du fantasme, la pulsion fait rappel du
principe de vie à travers la médiation du symbolique qui n'a pas de représentation imaginaire.
C'est en quoi le symbolique est l'instrument de l'autorité. Non
que le symbolique soit cette autorité par lui-même, mais
qu'il en est le vecteur, le lieu d'expression et de manifestation.
Il n'y a pas de relation (sexuelle) naturelle, parce que la relation
chez l'homme passe toujours par la médiation du symbolique qui
fait lien, ce
qui implique une perte, une absence au niveau imaginaire. C'est le trou
originaire, le trou imaginaire à la place de l'origine qui est
la cause du fantasme. Le symbolique
impose un ordre discret, discontinu à la place du tout-en-un
primitif. C'est ce que disent tous les mythes de genèse, le juif
comme les autres.
L'homme habite dans un univers ordonné par la parole, un univers
logique. Mais il demeure pourtant toujours une part illogique,
démesurée, une part qui fait souvenir de cet un perdu.
C'est la part du réel qui persiste dans la
répétition du symptôme, jusqu'à ce qu'il
soit reconnu comme loi de différenciation.
Oui nous avons perdu l'âge d'or, oui nous sommes sous le joug de
la loi qui interdit et sépare logiquement les
éléments de l'Un. Mais demeurer dans
l'indifférencié, ce n'est pas si gai qu'on le croit. La
loi c'est le symptôme qui fait autorité. Elle donne
à chacun une place différenciée dans l'un-tout
social. Elle le fait toujours de manière quelque peu arbitraire,
puisque la loi n'est pas naturelle mais artificielle, fabriquée
par l'homme. Finalement on l'a compris, la loi c'est l'instrument
nécessaire de la liberté, sans laquelle il n'y a
même pas d'individualité différenciée et
consciente. Sans laquelle nous serions des animaux. La conscience et la
liberté ont donc un prix : la séparation.
Mais par le symbolique, cette séparation peut être
transcendée, devenant autorité. Et c'est sous l'empire de
ce principe d'autorité symbolique que l'homme doit se placer
pour advenir à sa propre essence légitime.
* * *
Encore un effort pour (ne pas) boucler la boucle de la théorie :
Le lien entre le principe du réel (la vie) et l'une-dimension du
symbolique, c'est le symptôme. Le principe en effet ne se
manifeste jamais que comme symptôme. Soit ce qui manque à
l'Un pour être parfait. La perfection ne pourrait consister qu'au
prix de la forclusion du principe, comme enfer et aliénation.
Comme répétition indéfinie du même.
Si le principe se manifeste, c'est donc toujours à travers la
médiation du symbolique, comme l'un qui est au-delà de
l'être imaginaire. Pour rappeler la faille du désir cause
de l'être. C'est un symbolique qui au-delà du fantasme
affirme la loi de vie. Le symbolique dans le symptôme se nie
comme logos, raison, savoir... et représentation. Il ne fait
plus lien ; il est séparateur (métaphore
poétique). Cela signifie que le principe est absolu, purement
transcendant ; il ne saurait entrer dans aucun cadre
prédéterminé, logique ou autre.
L'imaginaire se constitue toujours dans l'horizon d'un plan. Le
symbolique comme représentation de l'être-un (axe
horizontal relatif) viendrait s'y insérer, devenant discours de
l'aliénation. L'autre symbolique, le symptôme comme
métaphore poétique (axe vertical absolu), viendrait y
objecter pour actualiser un écart, un trou qui donne de l'air et
de l'espace (esprit), prenant parti pour la liberté.
Ici nous sommes sorti de la perspective ontologique, il y a une rupture dans le discours, une mutation métaphysique comme dirait Houellebecq.
C'est un passage en forme de retour : du matérialisme vers
l'idéalisme. L'esprit s'affirme ainsi comme premier ; c'est le
réel absolu.
Esprit = Liberté = Vie
That all folks !