L'Alliance
de la Vie Consciente
Qu'est-ce que l'homme ? Qu'est-ce qu'être humain ? Parler
certes, mais et après ? Ne faut-il pas aussi sortir du
blabla ? Je propose de définir l'homme comme vie consciente.
La conscience engage l'homme à être responsable
non seulement de sa vie propre, mais de la vie en
général, dans une perspective si l'on veut
écologique, en tous cas générale. Il
s'agit de donner à l'homme, à
l'humanité plus précisément, une
dimension absolue, à le délivrer de ses attaches
aliénantes et parmi elles je compte aussi les attaches
sociales dans lesquelles on peut très bien s'enfermer
(famille, nation, religion, etc...). Le premier acte d'amour serait
celui de la reconnaissance de l'être et de l'alliance avec
l'être, donc avec la vie. L'homme ne s'est pas
fabriqué tout seul, c'est un être vivant, un
être naturel.
L'alliance de la vie consciente est une alliance rationnelle,
laïque et naturelle. C'est dans le cadre de notre
modernité historique, la vraie religion universelle. Je la situe
comme religion naturelle, un terme souvent employé avec
mépris, notamment dans la description des éthiques et des
philosophies des peuples dits premiers, autrement dits justement non
aliénés socialement, les sauvages quoi ! Mais ce terme je
le trouve moi très respectable.
La vie permet de donner à l'alliance humaine une dimension
transcendante, au-delà de l'humain. Pourquoi est-ce important ?
Pour la liberté qui n'existe qu'à partir de l'absolu,
mais aussi parce que rien n'existe qu'à partir d'un ailleurs,
d'un extérieur qui le fonde comme même. Si la division
n'existe plus entre les hommes, alors elle doit se retrouver quelque
part, dans cet ailleurs absolu que je nomme la vie. C'est un
problème structurel.
L'alliance que je propose doit effectuer le lien entre les hommes, mais
ce noeud ne peut tenir qu'appuyé sur une
extériorité transcendante. Depuis l'antiquité, les
états se sont fondés à partir d'une idée de
l'absolu appelée dieu. Or cet absolu là se défini
comme mythique, il n'est pas rationnel. Mon ambition est donc de
trouver un absolu rationnel. Et en même temps il s'agit d'aller
au-delà de la forme politique de l'état. Tout ceci est
très complexe et difficile à aborder, mais il faut bien
commencer par le faire, il faut bien que quelqu'un le fasse. Je
travaille pour la structure. Cela ne me donne aucun droit particulier,
seulement celui de la parole qui est commun à tous.
Justement, on pourrait préférer choisir comme absolu la
parole. Mais cela produirait une alliance uni-dimensionnelle, sans
profondeur, sans opacité. L'alliance que je propose est
pluri-dimensionnelle, comme le réel. Pas seulement humaine, pas
seulement naturelle. La parole enfin n'est pas tout, rien n'est tout.
Le risque ce serait d'en arriver à un totalitarisme de la
parole, où le savoir comme l'être serait refermé et
clos sur lui même, sans extériorité, sans
altérité. Or il faut que la structure respire, qu'elle
soit ouverte pour qu'elle soit viable. L'enfer est un endroit clos.
Enfin ce qui est en jeu ici, c'est la catégorie de la puissance.
L'état repose sur une idée de la puissance dont il est
sensé être une incarnation, ou du moins une
représentation. Les juifs nous ont appris qu'il n'y a pas de
représentation possible de la puissance, ou même qu'elle
est interdite. Aussi ceux qui parlent au nom de la puissance,
c'est-à-dire au nom de l'absolu, n'ont que le droit d'en parler.
L'exercice politique de la puissance revient au prince, ou au
représentant de l'état quel qu'il soit. Et il y a
toujours eu une division entre l'exercice de l'autorité
spirituelle ou religieuse et l'exercice de l'autorité politique.
La négation de cette division nécessaire se nomme
totalitarisme.
Les révolutions modernes ont voulu se passer de
la dimension spirituelle, pour fonder l'état sur un absolu
concret, or ce fut une erreur, peut-être nécessaire du
point de vue de l'évolution historique, mais à
présent justement, nous avons le devoir de tenir compte des
leçons de l'histoire et de chercher de nouvelles solutions. Ma
solution consiste à substituer à l'absolu mythique de
l'ancienne structure, un absolu rationnel.