Je suis
un corps |
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Pour répondre
à une question d'enfant
Comment se fait-il que tous les peuples aient eu la même
idée, peut-être au même moment, de
rendre un culte à des dieux ? D'où cette
idée est-elle venue ? Tous les peuples ne pouvaient
être en communication au même moment. Comment une
même idée peut-elle apparaître
à des endroits différents ?
On peut d'abord répondre que la communication entre les
peuples à toujours existé, même aux
temps préhistoriques. On peut aussi faire appel à
une organisation innée du psychisme humain. Mais la vraie
réponse est dans l'explication structurelle.
La structure universelle précède les
formes sociales concrètes particularisées. Il y a
une homogénéité de la conscience
humaine, à tous les âges de l'histoire
planétaire globale.
Toute société se défini par rapport
à un passé, une origine dont elle garde la
mémoire dans ses traditions culturelles, ses institutions,
ses coutumes, ses formes symboliques. Le symbolique est le
véhicule de cette mémoire : ce qui fait lien avec
le passé, l'origine.
Mais toute société doit aussi se
définir et se différencier par rapport
à ses voisines.
De sorte qu'il y deux axes : l'un temporel et historique, celui de
l'identité, l'autre spatial et géographique,
celui de l'altérité. Diachronie et synchronie.
Verticalité et horizontalité. Identité
et altérité.
La structure est dialectique. Si on penche plus du
côté de l'identité, on obtient la
guerre. Si on penche plus du côté de l'altérité, on obtient la
communauté
indifférenciée ou globalisée. La justice est dans
l'équilibre des deux pôles extrèmes de la
structure, par lequel on obtient l'alliance.
Les premiers cultes ont été des cultes des
ancêtres. Le dieu de Moïse est le dieu d'Abraham,
d'Isaac et de Jacob (Israël) (exode : 3/15 et 4/5). C'est le
dieu des pères, donc le dieu de la nation.
Rendre un culte aux ancêtres, fonde l'identité
nationale. La pensée juive a toujours
été une pensée historique, une
pensée de l'histoire (G. Scholem). Sans ancrage dans
l'histoire, il n'y a pas d'identité nationale.
C'est ainsi que les juifs se sont opposés à la
pensée mythique, cosmologique, qui visaient à
faire de la société un reflet de l'ordre
cosmique, comme en Égypte. La pensée mythique
dé-suppose l'histoire et pense le temps comme cycle, retour
éternel du même, à l'image du ciel.
Israël a une place particulière dans le concert des
nations. Il représente le principe diachronique, l'histoire,
la mémoire. Notamment grâce au livre,
c'est-à-dire à la Bible, qui n'est pas pour rien
l'objet essentiel de la religion juive. Prédominance du
symbolique sur l'imaginaire.
L'importance du Nom du père dans la théorie
lacanienne de la structure est à comprendre à
partir de là. On ne peut rien construire sans un ancrage,
qui passe par le symbolique, dans le passé,
c'est-à-dire dans le temps mythique des ancêtres
morts.
Le sacrifice rituel est aussi en son essence communion avec ce temps
mythique particulier. Réactualisation du temps
passé, voire originaire, dans le présent du temps
social. Le sacrifice devient acte de mémoire.