Je suis
un corps |
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Le système du
monde
Le système du monde n'est pas à fonder
abstraitement (et arbitrairement) en dehors du monde, il est
à lire dans le monde lui-même, où il
est déployé. Notre méthode est donc
plus aristotélicienne que platonicienne : la science ne peut
consister dans la contemplation des essences pures. Cette
méthode suppose l'absence de mépris pour la
matière, ou le refus du dualisme esprit/matière.
C'est dans le lieu concret de l'être que l'esprit s'incarne,
parce qu'il n'y a pas d'autre lieu et il s'y incarne comme structure.
Cette structure n'est pas de type géométrique,
c'est-à-dire qu'elle est non visuelle : elle est purement
symbolique, c'est-à-dire sans autre support
matériel que
celui des signes, alphabétiques ou mathématiques,
logiques ou numériques. Qu'elle soit structure signifie
qu'elle
se donne à lire et peut donc s'écrire.
***
Le monde est divisé : idéalisme et
matérialisme,
libéralisme et autoritarisme, impérialisme et
communautarisme. Aucun de ces systèmes (discours) n'est le
système
absolu : ils sont tous partiels et imparfaits. On s'en accommode ! S'il
y a une division du monde entre différents
systèmes concurrents, c'est parce-qu'il n'y a pas de
système absolu.
Croire le contraire mène au totalitarisme ou au fanatisme
qui
sont des extrêmes, des déséquilibres,
des
démesures : des maladies du système.
Le système absolu n'existe que comme lieu d'affrontement dialectique des
différents systèmes relatifs : c'est un lieu
neutre,
celui-là même que nous appelons le monde. Quand je
dis que ce lieu est neutre, cela signifie
qu'il n'a pas de sens, qu'il n'implique pas une
vérité.
Ce lieu est un lieu qui rassemble mais qui n'impose pas à ce
rassemblement une forme déterminée. Ce
rassemblement sans
ordonnancement, est incarné dans le modèle
politique de
la démocratie, qui ainsi n'est autre que le reflet du monde.
Le lieu du rassemblement existe comme institution sociale
préalable à toute orientation politique
déterminée. Le terme démocratie
désigne
donc ce lieu même, pas l'orientation qui est secondaire. En
général tout État est ainsi
constitué d'un
lieu de rassemblement ouvert (le parlement) et d'un lieu où
les
décisions de gouvernement sont prises (instance
exécutive). La séparation des deux interdit que
précisément l'absolu (le rassemblement neutre)
soit
identifié au relatif (l'orientation
nécessairement
partielle). La confusion des deux, c'est le totalitarisme.
Le monde est le lieu de rassemblement et en même temps celui
de
la division. La division est consubstantielle au rassemblement. Y
consentir, sans renoncer au rassemblement, c'est cela la
démocratie.
Le monde comme lieu de rassemblement, est le tout. Il peut
être
constitué symboliquement ou matériellement. La
puissance
technologique nous a donné aujourd'hui le pouvoir de
réaliser matériellement l'unification du monde.
Mais la
puissance technologique est incarnation de l'esprit qui depuis toujours
à travers la religion à eu pour fonction de
réaliser l'un. Les moyens n'ont donc changé qu'en
apparence, parce-qu'on ne saisit plus l'aspect spirituel des choses
matérielles : à cause de cette division que la
religion a
institué arbitrairement entre le profane et le
sacré.
On se plaint aujourd'hui que l'économique ait
remplacé le
politique, comme instrument de détermination historique.
Mais si
la politique est devenue comme obsolète, c'est en fait
parce-qu'elle aussi en se croyant autonome, s'est comme la religion,
séparée du monde/tout. Ce en dehors de quoi il
n'y a par
définition rien.
Ou alors est-ce que ce que l'on reproche au monde, c'est de ne pas
être ce lieu de rassemblement sans division qui n'est que la
négation du réel ? Négation qui dure
depuis que la
religion a placé Dieu hors du monde. Où ? Dans le
néant, puisqu'en dehors du monde qui est tout, il n'y a rien.
Le monde est le lieu du rassemblement. Cela ne veut pas dire qu'il soit
sans division. Je n'y reviens pas. Ou j'y reviens toujours.
La réalisation du rassemblement a été
d'abord
religieuse, c'est-à-dire purement symbolique. Même
sous
l'espèce du politique, le rassemblement ne pouvait
être
que symbolique. N'est-ce pas au fond ce que signifiait Marx quand il se
moquait (en bon allemand) de la ferveur républicaine des
français ? La puissance technologique a rendu possible enfin
le
rassemblement concret du monde. Mais la religion et la politique qui
soudain deviennent obsolètes ne peuvent supporter de se voir
ainsi arracher leur pouvoir. C'est à une
véritable
révolution structurelle que nous assistons.
Même la puissance militaire, au service du pouvoir politique,
s'avère incapable de produire par elle seule le
rassemblement.
Et malgré le rêve de certains qu'en soumettant le
politique au religieux, tout rentrerait dans l'ordre, le
réel
demeure : le lieu du pouvoir a changé.
C'est le monde comme lieu de rassemblement concret qui aujourd'hui
dirige le
tout (notion de globalisation). Il le fait parce-qu'il est enfin
constitué
matériellement, concrètement.
Mais il y a un danger : que la technologie devienne le nouveau pouvoir
totalitaire. C'est-à-dire qu'elle oublie à son
tour le tout qui la
précède et qui est sa cause. Le danger, c'est
l'autonomisation du technologique par rapport au monde : qu'elle se
prenne pour le tout à la
place du tout.
* * *
Le monde précède l'État. Celui-ci ne
se construit que comme superstructure sur son fond. Même
chose pour l'individu. On ne peut s'identifier au monde. Si tel
était le cas, la solution serait le sacrifice. Contrainte
structurelle : la division doit toujours exister dans le même.
Autres noms du tout : la multitude, l'inconscient, l'absolu, le
réseau déterritorialisé, le corps sans
organe (Deleuze et/ou Guattari).
Le tout est un système ouvert : il ne fait jamais un corps
fermé. On ne peut lui donner de forme
arrêtée : il précède toute
forme. Il n'a pas de contenant : il est le contenant suprême
(d'où la difficulté où nous sommes
pour penser l'univers infini).
On aurait tort d'opposer l'État au monde, ou
à la multitude. Les deux ne sont pas contradictoires, mais
complémentaires. La faute ce serait d'identifier
l'État à la multitude. Encore une fois une telle
identification est impossible, elle est même interdite.
Le seul qui puisse être identifié au monde, c'est
le sacrifié. Parce-qu'il n'existe que comme symbole (mort),
système de signes ouverts, antécédant
tout sens particularisé. C'est donc par et dans la mort que
l'on rejoint l'absolu, la fin de l'être
particularisé, ou la troupe anonyme des ancêtres.
L'État, l'individu, la propriété, le
moi, sont
des aspects légitimes de l'être. La seule
condition étant qu'il leur est interdit de se prendre pour
l'absolu, de s'y substituer. Quand cela arrive toutefois, la
règle est de les sacrifier. C'est ainsi que j'explique le
sacrifice du roi dans les sociétés primitives
(Frazer).
L'absolu indéterminé est la cause de
l'être déterminé. Avoir la conscience
de cette cause, c'est se situer justement dans le monde, à
une place relative et contingente, historique et
éphémère.
On ne peut rejoindre le tout que comme différence pure. De
là se déduit la liberté comme principe
de l'être individuel. Je ne suis
déterminé que par ma différ(e/a)nce.
La disjonction est impliquée dans la jonction.
Le désir est ce qui pour l'être sexué
représente cette loi de disjonction. D'où la
solution qui consiste à intégrer la division phallique
dans le monde commun, pour constituer un monde dialectique où la
division n'est plus proscrite, où le devenir, le temps, ne sont plus opposés à l'être qui est leur lieu.
La différence entre l'homme et la machine, c'est que la
machine n'a pas de sexe, pas de désir. Aussi demeurera
toujours une hétéronomie entre l'homme et la
machine. Le danger, c'est que par la puissance de la technologie, on
parvienne à refouler complètement,
victorieusement le désir qui objecte au tout. Le danger,
c'est le totalitarisme technologique.
Il ne s'agit pas de détruire les machines. Mais d'avoir un
rapport critique, non idéalisé, avec elles. Il ne
faut pas les utiliser pour combler cet espace vide, ce hiatus qui doit
demeurer entre l'être et le sujet du désir. Il
faut réduire la machine à ce qu'elle est
vraiment, s'en servir de façon pragmatique et
mesurée : pour ne pas être
dévoré.
La machine (ou la technologie au sens large) peut devenir une
tentation diabolique. Car elle peut nous faire oublier notre propre
division. Il importe donc d'être conscient, averti de ce
danger, pour pouvoir s'en garder. Encore une dialectique en somme. Ce
qui veut dire que tout progrès se paye de nouvelles
contradictions, interdisant à jamais l'espoir d'en finir
avec l'histoire et la division. Je ne proposerai pas de solution finale.
***
L'une des choses les plus intéressantes à
observer
dans le
système du monde, c'est la structure de la division : la
nature
concrète de l'opposition qui régit les discours.
On a vu (Vous pouvez emprunter ce passage
pour aller consulter mon article Zarathustra 2006) que
du temps des premiers états
indo-européens
différenciés, une division s'était
produite au
niveau de la religion, par la distinction A(h/s)uras/Daewas, les uns
(Iraniens) prenant le parti des A(h/s)uras, les autres (Indiens) celui
des
Daewas.
En Europe occidentale moderne, la division oppose les partisans de
l'Un, catholiques, impérialistes, universalistes,
dogmatiques,
autoritaires et matérialistes (ils représentent
l'empire
continental), aux partisans du Moi, protestants, démocrates,
idéalistes, pragmatiques, libéraux (ils
représentent la démocratie maritime).
On peut s'étonner que je qualifie les catholiques de
matérialistes, c'est que dans leur religion, il n'y pas la
distinction que font les protestants entre la dimension spirituelle et
la dimension matérielle. Ainsi le corps du Christ est pour
les
catholiques réellement présent dans la messe,
alors qu'il
n'est que symbolique pour les protestants. De même le pouvoir
du
Pape et de l'Église en général, est un
véritable pouvoir temporel. Alors que dans les pays
protestants,
le prince est indépendant des prêtres. Enfin, on
sait que
la querelle luthérienne a commencé à
propos de la
vente des indulgences : comment l'argent peut-il acheter le salut, la
valeur suprême ?
Ces divisions religieuses ne font que montrer la structure du tout,
aucunement religieuse elle en son essence, mais plutôt
purement
ontologique. Soyons clair : je ne suis pas un défenseur de
l'ontologie. Notre méthode consiste à opérer le
dégagement de la structure (dialectique) à partir de
l'être. L'être étant seulement à entendre
comme le lieu où se déploie la structure.
***
Un dernier problème me préoccupe : celui de la valeur ajoutée
que confère l'appartenance identitaire, communautaire ou
nationale, religieuse ou politique. Cela me semble un des
problèmes majeurs de la sociologie, mais hélas
encore
largement impensé. Pourquoi ? Parce-que sans doute on touche
là à des motifs collectifs puissants, qu'il est
difficile
de considérer froidement, avec toute la distance critique
nécessaire.
On sait bien qu'il y a un effet dissolvant de la masse sur les
individus, appelés à s'y noyer, à s'y
perdre.
Être dans l'Un suppose l'éradication de toute
différence ou contradiction. Et on aboutit
nécessairement
un jour, sans même s'en apercevoir, à des
monstruosités.
Comment on en arrive là ? Les individus sont
manipulés,
parce qu'on leur promet une identité enfin
purifiée de la
honte, une identité identifiée à la valeur absolue.
Quand à la honte, ce sont bien sûr ceux qui ne sont
pas de la bande qui doivent la porter.
Je me suis toujours gardé de tomber dans un tel
piège,
quitte à demeurer seul et isolé (et donc
à porter
la honte). Je pense que si le communisme a
échoué, c'est
largement parce-qu'il s'est réduit finalement à
une sorte
de culte de l'identité ouvrière, sans distance
critique
et avec beaucoup de haine. De cela je ne puis lui pardonner. Fonder la
théorie sur une idéologie de l'appartenance, fut
elle
classiste ou raciste, c'est faire le jeu de l'aliénation :
c'est
encore manipuler les gens au profit de l'Organisation, qui n'est
Personne, sinon l'abolition en acte de la Personne comme individu libre
: objection vivante au terrorisme totalitaire, soit à la
volonté de puissance amené à son
degré
ultime, où elle n'est plus que volonté
d'anéantissement de l'être.
Et à l'anéantissement de la personne comme individu
libre, correspond son érection comme objet d'identification dans
le culte collectif du chef/père/guide/führer. L'idole
imaginaire prends la place du lien social, c'est-à-dire de la
Loi.
Aujourd'hui nombreuses sont les organisations qui proposent une valeur ajoutée
à leurs adhérants : elles ne sont pas
essentiellement
religieuses, mais aussi bien intellectuelles, humanitaires,
politiques, voire sexuelles. Certaines pratiques ne sont là
que
pour signifier une distinction
(Bourdieu). Je prends ici l'exemple de
l'interdit du porc chez les musulmans, qui a reçu toutes
sortes
de légitimations rationnelles, mais dont la seule raison
d'être est de conférer à celui qui
observe
l'abstention, la fameuse valeur
ajoutée dont je cherche ici à percer
le mystère.
Vous voyez où je veux en venir : j'ai Marx dans le
collimateur. Je définirai la valeur ajoutée
à partir du social et non à partir de
l'économique. Marx n'a rien compris : il a pris un domaine
particulier du social pour le tout et a voulu tout fonder à
partir de là : d'où l'écroulement de
son
système à l'arrivée, devant
l'épreuve des
faits. Écroulement patent, sauf pour les aveugles,
ça va de soi.
Cependant si j'enlève l'économique à
son système, je conserve la valeur ajoutée.
Objet qui reste à penser. Comment est-elle produite, comment
est
-elle commercialisée (mise en circulation), comment est-elle
consommée ? A quoi sert-elle, quelle est sa fonction ?
La valeur
ajoutée est
autant valeur d'usage que valeur d'échange. Autrement dit,
on en
jouit et on en tire des bénéfices sociaux (dont
économiques). Celui qui refuse toute valeur
ajoutée est
un saint (il décharite).
Ce qu'on appelle la purification, sensée être le
produit du sacrifice rituel, n'est autre que la production de la valeur absolue, à partir du sacrifice de la valeur ajoutée. Au commencement est cette idée d'une valeur
suprême,
absolue, au-delà des valeurs particulières (de la
jouissance), et qui est
aussi un
principe régulateur entre les parties
séparées du tout : ce qui fait loi. Ainsi la
sociologie a
établie
que le sacrifice produisait du lien social.
La valeur
ajoutée doit ainsi au terme de notre analyse
être identifiée à la chose sacrifiée constitutive du tout,
soit de la société même (Durkeim).
Il s'agit par l'acte rituel du sacrifice de passer d'un objet
particularisé, individualisé, voire enraciné, à un
système
d'échanges symboliquement ordonné. L'un
continuant
d'exister dans le multiple, sous la forme du lien. Il s'agit de la
constitution de l'alliance, principe du lien social, à
partir de la métaphore déterritorialisante.
Ainsi donc il est vrai qu'il faut sacrifier le Capital, pour qu'il y
ait constitution d'une communauté. Mais il faut repenser
tout
cela dans une perspective à la fois plus
générale
et plus fondamentale. Et notamment sortir du paradigme
économique, trop réducteur et insuffisant
à
répondre de l'ensemble du système du monde dont
nous
sommes sujets.
***
A partir de là, une nouvelle question se pose : pourquoi
est-ce que chez le peuple, les discours
simplistes de la valorisation identitaire l'emportent à coup
sûr sur tous les autres ? Parce-que la production de la
valeur
absolue (purification) n'est plus prise en charge par la religion,
à travers le sacrifice rituel. Or elle ne peut
être produite que par des moyens symboliques. La technologie
seule en est finalement incapable. On a trop nié la
dimension spirituelle, ou mal interprétée.
Certains ont cru que l'on était passé d'une
religion
rituelle, axée sur le sacrifice, à une religion
purement morale,
le salut devenant une question de conduite ou de foi : c'est-à-dire de croyance en un sens surdéterminé.
Les protestants ont avec raison
fait entendre que par les actes, il ne peut y avoir de justification,
tout au plus témoignage. Cependant la solution de la
justification par la foi et la prédestination
élective,
demeure elle-même trop obscure et interdit tout examen critique : ce n'est qu'un
semblant de solution. Au fond,
le problème central, c'est dans la
religion moderne, le déni de l'efficacité des
rites. On
ne croit plus que le rite du sacrifice puisse par lui-même
produire la "grâce"
efficace.
C'est qu'on ne sait plus bien en quoi consiste justement le sacrifice :
il s'agit de sacrifier la valeur
ajoutée, donc de s'en libérer, comme
cause de la division, de la concurrence, de la haine. Il s'agit de
transcender la division pour accéder à l'absolu
qui est au-delà.
Ce n'est pas essentiellement la violence qui est traitée et
résolue dans le sacrifice (thèse de
René Girard), c'est la jouissance en rapport avec
l'appropriation toujours imaginaire (et donc illusoire) de la valeur ajoutée
(du sens).
Ce pourquoi face au désir phallique (diviseur), il est évidemment nécessaire de maintenir comme
impératif moral l'alliance du monde commun (donc la
contradiction encore !).
Je choisirai alors de m'en remettre à la tradition
religieuse, faute
de mieux. Un peu comme
Pascal, dont l'argument du pari n'est là que pour faire
semblant de raison. Je me soumets, en bon musulman. Je suis un croyant
malgré tout, je suis même crédule : je
crois tout ce qu'on me dit ! La pensée critique ne serait
elle donc qu'un souci stérile ?
Trop de fatigue, pour bien peu de profit ! Mais n'est-ce pas cette
recherche même du profit (du sens caché) qui est
à remettre en question ? Tant pis si la
pensée critique est un souci inutile : il fallait bien en
passer par là. Elle m'a mené là
où il fallait et ainsi elle est justifiée.
Il convient d'avoir foi en la parole, sinon plus rien n'a de sens.
C'est-à-dire plus de consistance. Ce n'est pas moi qui
choisis, c'est l'Autre comme dirait Lacan. Non pas pour sauver le sens,
mais
plutôt pour réaliser son absence, ou sa
déroute. Voici l'abîme où la
raison choit.
Ais-je été suffisamment dialectique, cher Platon
? Et toi Héraclite, qu'en penses-tu ? Et toi Aristote,
comprends-tu pourquoi le discours n'a pas de maître et qu'il
en libère l'esclave ? Sais-tu qu'après toi est
venu un homme nommé Jésus qui a donné
le royaume aux simples d'esprit, qui est mort sur la croix et qui est
ressuscité le troisième jour ? Que de choses
étonnantes à entendre et à dire !
Abîme de la raison, vérité du
mystère.
Artaud, Rimbaud, le chant n'est pas mort. Ne pleurez plus mes
frères sur la mort d'Orphée. La lyre est
éternelle. Demain nous chanterons et nous danserons dans les
rues et nous ferons tomber les murs de cette prison. Les trompettes de
l'apocalypse résonnent encore. La vie est belle. La voie est ouverte. L'amour a vaincu la raison.
Mais en attendant demain, encore un effort pour faire entendre le dire
: il ne s'agit pas d'opposer la division phallique au monde
commun, mais au contraire de l'y intégrer. C'est cela le secret de la démocratie : accepter
qu'elle soit le lieu de la division, non celui d'un tout
clôt, fermé sur lui même, sans
abîme ou sans Autre. Le lieu de la démocratie
supposant le lieu de la parole qui comme inconscient demeure
oublié dans tout énoncé. Retour
à Lacan et déposition du maître.